La 41e édition du Festival international de Piano La Roque d’Anthéron déploie l’espace Florans, mis en place l’année dernière. Sur cette scène magique installée au bout d’un long allée aux deux murs de platanes centenaires, on peut y entendre en fin de l’après-midi des concerts de piano ou de musique de chambre, accompagnés de chants de cigale.
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De véritables tableaux sonores : De la forêt de Bohème de Dvořák
Sur la scène spécialement aménagée, le 28 juillet, David Salmon et Manuel Vieillard, deux jeunes pianistes qui forment Geister Duo, nous proposent deux suites méconnues. La première, De la forêt de Bohème op. 68 de Dvořák est, selon eux, l’une des plus belles musiques du répertoire pour piano à quatre mains. « Près du lac noir », « Nuit de Sabbat », « Silence de la forêt »… Les titres reflètent des cadres enchanteurs, en parfait accord avec le lieu. Nos deux musiciens donnent libre cours à leurs imaginations sur un Bechstein à la sonorité boisée. Ils proposent de véritables tableaux sonores, aux couleurs lisses, nuancées ou brutes, dans des expressions douces, vivifiantes ou troubles. La musique est descriptive et poétique : scintillements d’eau, vent, agitations, bruits de la forêt… Si l’écriture évoque d’une certaine manière la musique de salon, Salmon et Vieillard la subliment pour en faire une sorte de symphonie pianistique, tout en portant une grande attention à la sonorité. L’équilibre entre les quatre mains est tel qu’on croirait un seul musicien !
La force descriptive dans Petroucha de Stravinsky, ballet intégral pour quatre mains
De Petroucha de Stravinsky, les Trois Mouvements pour piano seul sont célèbres pour leur virtuosité. Mais ici, c’est le ballet intégral que propose le Geister Duo. « Stravinsky a transcrit la pièce entière, cela veut dire qu’il y a une intention de sa part. Alors, nous avons voulu jouer en entier ! » Il est vrai que, entre ces mouvements pittoresques, les pièces plus calmes ou méditatives offrent des contrastes fascinants, surtout lorsqu’elles sont jouées avec autant d’attention. La force descriptive est encore davantage éclatante que Dvořák, et nos pianistes rendent merveilleusement le récit musical. L’interprétation évoque indéniablement les couleurs orchestrales, tout en restant purement pianistique. Mais le piano est adapté à d’autres types de répertoires (Dvořák va très bien), n’ayant pas autant de brillance ni de longueur de son que demandent Petroucha. Et cela nous laisse hélas sur notre faim…
En bis, on retrouve la sonorité tout à fait adaptée à cet instrument, sous la fine sensibilité de nos deux pianistes. Laideronnette, Impératrice des Pagodes et Les Entretiens de la Belle et de la Bête, extraits de Ma Mère L’Oye de Ravel, ont ainsi comblé la faim ressentie précédemment.
Geister Duo, 28 juillet 2021, Festival international de piano La Roque d’Anthéron, Espace Florans © Valentine Chauvin
