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Dialogues entre Félix et Fanny Mendelssohn sur un piano d’époque

Olga Pashchenko livre une interprétation magistrale sur un piano historique

par Victoria Okada

Tous les pianistes apprentis ont joué au moins une ou deux pièces des Lieder ohne Worte, ou Romances sans paroles, de Félix Mendelssohn. Mais leurs mélodies chantantes et élégantes et leurs harmonies claires ne sont-elles pas victimes d’un préjugé persistant : ce seraient des morceaux sentimentaux et faciles, car salonnards ?

Une fois qu’on a écouté ce disque, on corrige vite cette idée !

Élève du grand Alexei Lubimov, Olga Pashchenko est particulièrement réputée pour l’interprétation sur instruments historiques (mais elle joue aussi sur le piano moderne). Ici, l’enregistrement a été effectué sur le piano Graf de 1836 de la collection Geelvinck (restauré par Gijs Wilderom), c’est-à-dire un instrument fabriqué du vivant de nos compositeurs. En mettant en valeur sa sonorité perlée, que Félix et sa sœur Fanny avaient certainement en tête en composant ces pièces, elle imagine des dialogues musicales comme des échanges épistolaires. Des Lieder für das Pianoforte de Fanny, aussi douée que son frère — certains musicologues supposent même que des partitions signées Félix seraient en réalité de la main de Fanny —, répondent ainsi aux Romances sans paroles de Félix et vice versa, dans une interprétation inspirée qui bouleverse la vision de ces « mignonnettes », s’avérant infiniment profondes.

Écoutez par exemple avec quelle vigueur la pianiste joue la première pièce, Molto allegro e vivace, op. 19b n° 3, ou l’avant-dernière, Molto allegro vivace, op. 53 n° 6, de Félix ; écoutez aussi avec quelle élégance elle livre de subtils rubatos dans l’op. 2 « Villa Millis » Allegretto gracioso, H.357, de Fanny ; écoutez encore avec quelle profonde introspection elle interprète l’op. 19b n° 6, « Gondoles de Venise » de Félix ; écoutez toujours avec quel sentiment d’urgence elle offre l’op. 4 « Wanderlied » Presto, H.458, de Fanny et l’op. 38 n° 5, Agitato, de Félix. On pourrait énumérer toutes les pièces ainsi, tant le jeu d’Olga Pashchenko est envoûtant et passionnant.

Quel beau disque elle nous offre à partir d’un programme aussi familier qu’inattendu !

« Guesse Who ? », œuvre de Félix et Fanny Mendelssohn par Olga Pashchenko, sur un piano Graf, 1836.
1 CD Alpha Classics, ALPHA1119. Enregistré en mai 2023 à Muziekcentrum van de Omroep, Hilversum (Pays-Bas).
Durée : 82’55

PS. La ressemblance entre le motif initial du Romance sans paroles  l’op 62 n° 3 et celui du début de la 5e Symphonie de Mahler est frappante, mais qui en parle de la manière approfondie ? Si vous connaissez des études ou des commentaires, merci par avance de me signaler !

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