Accueil ScènesConcerts Rencontres Musicales d’Evian #1 – Juan Diego Flóres entre prudence et relâchement

Rencontres Musicales d’Evian #1 – Juan Diego Flóres entre prudence et relâchement

par Victoria Okada

Du 26 juin au 3 juillet, La Grange au Lac d’Evian retrouve son âme grâce à ses Rencontres Musicales. Si, l’année dernière, le festival a pu se maintenir avec une jauge très réduite, l’édition de cette année renoue avec le public dans une atmosphère estivale habituelle, même si des orages et des averses s’y invitent pour apporter de l’air plus que frais.

Ambiance extérieure de la Grange au Lac d’Evian © Matthieu Joffres

Juan Diego Flóres prudent, mais avec une voix somptueusement jeune

À la deuxième soirée, le 27 juin, lorsque Juan Diego Flóres entre sur scène, une certaine prudence peut se lire dans son allure élégante. Son programme est constitué d’airs d’opéras, italiens dans la première partie et majoritairement français dans la seconde. Deux airs de Rossini, extraits d’opéras assez méconnus du grand public (Il figlio par azzardo et Il pietra del paragone) précèdent une pièce de piano solo Danse sibérienne du même Rossini par Vincenzo Scalera, puis, « Una furtiva lagrima » (L’Elisir d’amore) de Donizetti.

Dans des représentations d’opéra, il arrive parfois que le tempo du chant diffère légèrement de celui initialement donné par l’orchestre, mais ce soir, le chanteur prend une mesure beaucoup plus lente que l’introduction du piano. Par ce tempo, on sent le soin que Flóres apporte à chaque note, comme dans tous les airs qu’il interprètera par la suite. Qu ce soit Donizetti (« Tombe degli avi miei », Lucia di Lammermoor), Verdi (« Lunge da lei… », La Traviata), Puccini (« Avete torto !… Firenze è come un albero fiorito », Gianni Schicchi et « Che gelida manina », La Bohème), ou Lalo (« Vainement, ma bien-aimée », Le Roi d’Ys), ou encore Gounod (« Ah ! Lève-toi, soleil », Roméo et Juliette et « Salut ! Demeure chaste et pure », Faust), la prudence prend toujours dessus.

On sent même sa préparation technique et mentale pour projeter de manière parfaite des notes clé à ne pas rater, au détriment de la spontanéité. Le pianiste s’y adapte merveilleusement, pour mettre en valeur toutes les qualités du chanteur. Juan Diego Flóres assume avec succès ce programme « lourd » avec des airs exigeants, grâce à sa voix qui demeure toujours solaire, rutilante et juvénile. En pensant à son âge (il est né en 1973), on se rend compte que cet exploit est véritablement exceptionnel.

Juan Diego Flóres à la guitare, 27 juin 2021 à la Grange au Lac d’Evian © Matthieu Joffres

Mais c’est après le programme, dans les quatre bis donnés généreusement, qu’il révèle davantage son incroyable souplesse vocale. À travers trois chansons latines à la guitare (il s’accompagne lui-même) et un tango avec le piano, il lâche littéralement la tension et la préoccupation de placer la voix de manière impeccable. Et celle-ci résonne avec tout le naturel du monde et tout simplement incroyable. Il va de soi que le public l’applaudit à tout rompre, quelque part soulagé de voir le chanteur ainsi libéré.

La suite des Rencontres musicales d’Evian : #2 Mantra de Stackhausen par J.-F. Heisser et J.-F. Neuburger

Concert de Juan Diego Flórez et Vincenzo Scalera à la Philharmonie de Paris : le 3 décembre 2021 à 20h30 (production Les Grandes Voix)

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