Claude Le Jeune (1525/30-1600) est un compositeur encore méconnu. Toutefois, les chanteurs-choristes ont certainement chanté quelques pièces de cet homme originaire de Valenciennes (à l’époque les Pays-Bas) aux côtés des partitions de Giovanni Pierluigi da Palestrina et Roland de Lassus, de la même génération.
Contemporain de William Byrd, Tomas Luis de Victoria, Giovanni Gabrielli, Carlo Gesuardo, Claudio Monteverdi, Le Jeune est l’un des protagonistes de l’Académie de poésie et de musique — initiée en 1570 par Jean-Antoine Baïf, membre de La Pléiade, et Joachim Thibault de Courville, chanteur. Il travaille, avec les autres musiciens de l’Académie, sur le lien entre la poésie et la musique en s’inspirant des rythmes de la métrique grecque, le mouvement que l’on appelle la « musique mesurée à l’antique ».
Nous connaissons ses œuvres grâce à sa sœur Cécile qui, à la mort de son frère, rassembla une quarantaine de pièces « mesurées » dans Le Printemps, publié en 1603. Dans ce disque, Dominique Vellard et son Ensemble Gilles Binchois (qui a fêté ses 40 ans l’année dernière) ont choisi une quinzaine d’œuvres extraites du recueil. Ils différencient alors la manière d’interpréter pour montrer la diversité musicale. Les voix et les instruments à combinaisons et effectifs variés raniment ainsi constamment les propos, en conférant à cet enregistrement une fraîcheur exquise.
La Première Fantaisie à 4 fascine pour l’association des timbres de cordes pincées, alors que dans La bel’ Aronde, les harmonies pour le refrain « La véla, ie la voy » s’impriment immédiatement dans les oreilles pour ne plus quitter ! Si les interprétations suivent le code généralement adopté pour la musique de cette période (voix avec peu de vibrato, instrumentation dépouillée, ornements intimes…), on imagine très facilement le potentiel de ces chansons pour des arrangements plus modernes, en transcendant les styles. Quoi qu’il en soit, l’Ensemble Gilles Binchois propose une version jouissive et juvénile.
Ainsi, la sensation que procure l’écoute de ce CD est si vivante que c’est comme si ces chansons étaient écrites hier !
1 CD Evidence Classics, EVCD069. Durée : 64’14