Accueil ScènesConcerts Rencontres Musicales d’Evian #2 – Mantra de Stackhausen par Heisser et Neuburger et… l’orage !

Rencontres Musicales d’Evian #2 – Mantra de Stackhausen par Heisser et Neuburger et… l’orage !

par Victoria Okada

Deux concerts s’offrent le lundi 28 juin à la Grange au Lac. D’abord, à 17h30, Mantra de Karlheinz Stockhausen, composé entre 1969 et 1970. Un œuvre emblématique qui, à l’époque, nécessitait un dispositif électroacoustique très imposant.

Si le dispositif est aujourd’hui facilement réalisable grâce au progrès informatique, la pièce n’en reste moins impressionnante, avec, en plus de deux pianos, un jeu de woodblock, de métallophone, de crotales. Au début du concert, à la Grange au Lac dans le cadre des Rencontres Musicales d’Evian, deux Jean-François Heisser et Jean-Frédéric Neuburger prennent successivement le micro pour une explication succincte sur la gestation du projet ainsi que le contexte de l’époque dans lequel l’œuvre fut créée.

Une musique de Stockhausen avec une électronique dans un lieu comme la Grange au Lac surprend quelque peu. Mais c’est précisément parce que cela se passe à la Grange que ce concert revêt une dimension plus large, car il n’est pas réservé au public de la musique contemporaine spécifiquement localisé selon les lieux !

J.-F. Heisser & J.-F. Neuburger (et les fils électriques que l’on ne voit pas forcément depuis la salle) dans Mantra de Stockhausen, 28 juin 2021 à la Grange au Lac d’Evian © Matthieu Joffres

Quand les deux pianistes commencent à jouer, ils semblent encore « appliquer » la partition, dans une sorte de calcul mentale pour une synchronisation et pour bien rendre l’effet sonore œuvré à la manette par Serge Lemouton. Cette sensation se dissipe lentement à mesure des « variations ». En effet, la redoutable difficulté des deux parties de pianos qui n’évoluent pas parallèlement est à maîtriser avec la précision d’une horloge, à quoi s’ajoutent des percussions (et la manipulation de baguettes). Chacun interprète avec un tempérament qui lui est propre, tantôt en confrontation, tantôt en fusion harmonieuse. Un orage violent éclate au moment où un certain silence domine dans la musique constamment en mutation, la pluie diluvienne frappe le toit et les murs alors que les bruits de tonnerre rivalisent avec les notes en fortissimo. Heisser et Neuburger s’engagent alors davantage dans la musique, comme s’ils avaient été inspirés et stimulés par les phénomènes naturels. Même si chacun a eu sa dose de dysfonctionnement sur sa tablette, la gigantesque machine de l’interprétation roule désormais en plein régime.

J.-F. Heisser & J.-F. Neuburger saluant le public, 28 juin 2021 à la Grange au Lac d’Evian © Matthieu Joffres

Cependant, nous ne sommes pas pour autant « enveloppés dans la bulle » (comme disait l’ouvreuse en nous plaçant) des sons du piano électroniquement transformés, comme nous nous y attendions. Différents spectres de ces sons sont certes parfaitement audibles, mais cela est resté assez sec et distant… La nature était-elle plus forte que cette œuvre monumentale ? Ou l’acoustique de la salle ne permet pas assez de retours du son ? C’est peut-être le seul regret que nous avons émis durant une interprétation magistrale.

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