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Lille Piano(s) Festival #3

Récitals espagnols

par Victoria Okada

Lille Piano(s) Festival organisé par l’Orchestre National de Lille, a eu lieu du 10 au 12 juin, en accueillant plus de 70 artistes et 3 orchestres en 40 concerts, sous le double thème de Bartók et « Espagnes ». Pour ce troisième et dernier article, nous partons tout droit au cœur de ces thèmes.

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Récitals espagnols

« L’Espagne donne la joie, le soleil, quelque chose de gai. Et nous avons voulu mis en avant cette atmosphère festive du Sud après une longue période morose », affirme Fabio Sinacori, directeur de la programmation de l’Orchestre National de Lille qui était également le programmateur du Lille Piano(s) Festival.
Deux récitals en solo et un en duo répondent parfaitement à cette attente, chacun avec un programme spécifique.

Lisez notre compte-rendu sur les concertos et sur le récital de Benjamin Grosvenor.

 

Hervé Billaut et Guillaume Coppola offrent des « Rêves d’Espagne »

Guillaume Coppola et Hervé Billaut, 11 juin 2022, Conservatoire de Lille © Victoria Okada

« Rêves d’Espagne », un programme à quatre mains de Hervé Billaut et Guillaume Coppola, évoque en grande partie une Espagne fantasmée pour laquelle la France a pris passion à la fin du XIXe siècle, suite à un immense succès de l’opéra Carmen. D’un accent fauréen (Sept chants de terroir de Vincent d’Indy) jusqu’à la véritable sensation espagnole (Rapsodie espagnole de Ravel) en passant par de pures imaginations (Les Gitanos – valse espagnole de Mél Bonis), toutes les possibilités sont explorées dans une interprétation rythmée et harmonieuse, ponctuées de commentaires par les pianistes eux-mêmes qui éclairent leurs intentions musicales. Pour La Valse de Ravel qu’ils avaient prévu de jouer à quatre mains, ils racontent comment cela s’est transformé en deux pianos — une anecdote croustillante qui montre non seulement l’adaptabilité des musiciens mais aussi l’efficacité de l’équipe technique face à une situation imprévue.
Les deux pianistes soignent leur élégance vestimentaire avec des chemises bleues à motif floral, qui confèrent une touche supplémentaire de gaité à leur jeu solaire.

 

Albert Guinovart, trop rare en France

On rencontre trop peu d’occasions d’entendre en France Albert Guinovart, compositeur et pianiste, « un des grands ambassadeurs de la culture musicale catalane » selon le programme. La lacune est réparée au temps du Lille Piano(s) Festival avec ses deux récitals et un concert symphonique qui présente son arrangement de la Suite Goyesca de Granados (lire notre compte rendu des concertos). Le deuxième récital auquel nous avons assisté se compose essentiellement de Valses poéticos de Granados et de ses propres compositions, Valsos Poètics, en parfait pendant des premières (excepté Vals mariposa de Granados qui ne trouve pas l’équivalent chez Guinovart). Au tempérament outre-pyrénées s’ajoute une douceur ; ce récital fut une excellente occasion de découvrir un artiste sensible, habité par une poésie.

 

Teo Gheorghiu et « Duende »

Teo Gheorghiu, 12 juin 2022, Conservatoire de Lille © Victoria Okada

Le dernier récital de l’édition 2022 est tenu par Teo Gheorghiu, désormais un des habitués du Festival. Le pianiste suisso-canadien d’origine roumaine joue son programme « Duende » (qu’il a gravé en disque sorti fin 2020), le terme se reporte au « génie du peuple andalou et de l’âme espagnole » (Federico Garcia Lorca). Construit autour de la Suite espagnole d’Albéniz qu’il divise en deux parties, le programme comprend également des pièces de Debussy (La puerta del vino), Ravel (Alborada del gracioso) et de Falla, qui servent comme des liens entre les deux parties et la conclusion (Danse rituelle du feu). Outre cette intelligence architecturale, les tons et les nuances qu’il explore sont subtiles et réjouissants. Dans une sonorité chaude, il dose des mouvements fuyants de tempos, en y assaisonnant de caractère à la fois ferme et raffiné. Il sublime ainsi son Espagne, invitant l’auditoire à un voyage de rêve. Ce rêve, le public veut le prolonger davantage et le musicien de lui répondre avec le retour à l’une de ses origines, l’Europe centrale, avec l’Allegro Barbaro et les Danses roumaines de Bartók. Le boucle est bouclé, avec ce deuxième thème du Festival.

 

Cédric Pescia et Philippe Cassard, 12 juin 2022, Conservatoire de Lille © Ugo Ponte-ONL

Nous ne pouvons pas ne pas mentionner la magistrale Neuvième Symphonie de Beethoven à deux pianos par Cédric Pescia et Philippe Cassard, l’édifiant récital de Marie-Ange Nguci avec des œuvres de Chopin, de Prokofiev et de Saint-Saëns (lire notre compte-rendu sur son interprétation du 21e Concerto de Mozart), ainsi que le programme du baroque français (Couperin et Jacquet de la Guerre) interprété avec grande souplesse par le Quatuor Nevermind. Tout cela offre de vibrants et éloquents preuves du dynamisme du Lille Piano(s) Festival.

 

11 et 12 juin 2022, Lille, Nouveau Siècle et Conservatoire

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