Collectionneur de pianos d’époque, Jos van Immerseel est l’un des pionniers de ce qu’on appelle aujourd’hui « l’interprétation historiquement informée ». Il recherche constamment les pensées de compositeurs à travers les sonorités et les fonctionnements d’instruments anciens qui ne sonnent pas de la même manière que des pianos modernes de concert. Les trois disques qu’il a enregistrés à l’été 2019 résultent de ses réflexions. Il choisit ainsi le pianoforte construit par l’éminent facteur Christopher Clarke en 1988 d’après l’instrument viennois d’Anton Walter datant d’environ 1800. Cette datation est déterminante pour les œuvres enregistrées, composées entre 1798 et 1804. En effet, la facture instrumentale a connu une évolution spectaculaire dans cette période. Cela entrainait un changement parfois radical de la conception de la musique, surtout chez Beethoven, friand de nouveauté. Le pianiste explique lui-même le choix de ce pianoforte dans le livret.
Quant à l’interprétation (Sonates n° 5, 7, 8, 9, 10, 14, 15 et 18, ainsi que la marche funèbre de la Sonate n° 12 et quelques pièces isolées), il prend généralement un tempo assez ou très posé — est-ce lié au fonctionnement de l’instrument ? — et ses expressions sont truffées de détails étonnants et surprenants, notamment des agogiques inattendues (qui peuvent parfois être assimilées à un rubato) à des accents secs. Tout cela montre un visage bien différent de Beethoven joué habituellement sur un Steinway ou un Yamaha et donne un aperçu extrêmement intéressant de la « sonorité de l’époque ».
Coffret de 3 CD Alpha Classics, ALPHA594. Durée : 77’23, 59’20, 77’55.